Un retour en arrière pour les droits des combattants ?
Instauré en 2000, le Muhammad Ali Boxing Reform Act visait à protéger les boxeurs des conflits d’intérêts et à garantir une certaine transparence entre athlètes, promoteurs et fédérations. Mais selon de nombreuses voix critiques, la nouvelle proposition de loi fragiliserait ces acquis.
« Maintenant que TKO se prépare à entrer dans le monde de la boxe, la première chose qu’ils veulent faire est de modifier cette loi et de rendre les combattants vulnérables », alerte Oscar De La Hoya, ancien champion et promoteur. « TKO a besoin que cela change pour appliquer à la boxe les mêmes pratiques contraires à l’éthique qu’ils ont utilisées pour bâtir un monopole avec l’UFC. »
Une “UFCisation” de la boxe ?
Le projet de loi permettrait la création de nouvelles entités appelées organisations de boxe unifiées (UBO), autorisées à gérer les classements, attribuer des titres et organiser des événements, écartant ainsi les fédérations historiques (WBC, WBA, IBF, WBO…).
Certes, les UBO offriraient des garanties renforcées en matière de santé, de sécurité et d’antidopage — inspirées du modèle UFC. Un minimum garanti de 150 dollars par round serait également instauré. Mais selon Erik Magraken, avocat canadien spécialiste des sports de combat, ces exigences élimineraient progressivement les petits et moyens promoteurs, menant à une concentration du pouvoir. « Les galas de moindre envergure n’auront pas les moyens de se conformer à ces critères. Cela favorisera un monopole, au détriment de la diversité des promoteurs », explique-t-il au média Boxing Scene.
Cette loi représenterait un boulevard pour la création de la ligue TKO annoncée par Dana White, président de l’UFC et Turki Alalshikh, président de la GEA (General entertainment authority) d’Arabie saoudite, en mars dernier.
L’UFC : un modèle contesté
Ce modèle centralisé rappelle celui de l’UFC, critiqué pour ses pratiques économiques. Selon Bob Arum, légendaire promoteur de Top Rank. « L’UFC contrôle beaucoup plus les bourses que nous. Les combattants UFC reçoivent 20 % des bénéfices bruts, alors que 80% des bénéfices des promoteurs reviennent aux boxeurs. »
En 2023, l’UFC a généré un chiffre d’affaires de 1,3 milliard de dollars. Moins de 20 % de cette somme a été reversée aux combattants — bien en dessous des standards des grandes ligues sportives américaines (NBA, NFL, MLB, NHL), où les athlètes perçoivent environ 50 % des revenus.
Oscar De La Hoya rappelle d’ailleurs que l’UFC a récemment accepté de verser 375 millions de dollars pour mettre fin à un recours collectif intenté par d’anciens combattants, qui l’accusaient d’avoir artificiellement maintenu les salaires à un niveau bas.
« C’est un avertissement pour tous les boxeurs. » conclut-il.
À retenir
- Le Muhammad Ali Boxing Revival Act risque d’ouvrir la voie à un monopole semblable à celui de l’UFC.
- Des protections accrues sont promises, mais au prix d’un affaiblissement des structures indépendantes.
- De nombreuses figures du sport dénoncent une tentative de contrôle accru sur les combattants, au détriment de leur pouvoir de négociation.